5
Si je suis en mesure de me représenter et de suivre cette scène avec le sentiment d’y avoir assisté, la raison en est simple : une fatigue générale m’a fait recourir aux soins du docteur Kersten, et, pendant deux semaines, chaque jour, soumis à ses doigts qui travaillaient et revivifiaient mes nerfs déficients, je l’ai observé avec toute l’attention dont je suis capable.
Une fois, je lui ai demandé :
— Quand vous traitiez Himmler, aviez-vous la même méthode, le même comportement, les mêmes attitudes ?
Il m’a regardé avec surprise et répondu :
— Bien sûr… exactement… comme avec tous mes malades.
Sans doute, Kersten, alors, avait vingt années de moins.
Mais il appartient à cette catégorie d’hommes qui, par la structure et l’expression essentielles des traits, par la tenue du corps, demeurent, malgré les marques du temps, fidèles à leur image plus jeune. Je n’avais qu’à dépouiller sa figure – et cela était facile – de quelques rides, ses membres de quelques lourdeurs et, en vérité, je voyais cette première approche.